La Nubra Valley.

Après avoir visité Leh je me mets en route pour la Nubra Valley, plus au nord. Il paraît que c’est un endroit incontournable et que c’est magnifique… Pour y aller apparemment il y a des jeeps qui font le trajet tous les matins. Pour trouver l’endroit exact c’est digne d’une épreuve de fort boyard. Je pars en repérage la veille, je demande à plein de gens, certains m’envoient à un endroit, d’autres complètement à l’opposé… Je parcours une bonne partie de la ville, de quoi devenir chèvre. En plus il fait 40 degrés, un nuage de poussière s’abat sur moi à chaque passage de voiture et de bus. Très souvent pendant mon voyage il faut que je parte à la pêche aux infos, pour savoir si il y a un bus pour qui va là, à quelle heure etc… 

C’est très souvent comme ça mais ça me plaît, quand j’arrive à avoir les infos que je veux, et dieu sait combien ça peut-être difficile dans certains pays, j’ai l’impression d’avoir trouvé le saint Graal ou d’avoir gagné au loto. Bref je sens que je chauffe pour trouver ces jeeps, de plus en plus de gens me montrent une grosse antenne radio perdue dans une rue déserte de Leh. Là je tombe sur un papy très gentil qui me dit que c’est normal si c’est désert car il n’y a des jeeps que le matin. 
Bref le lendemain matin je me lève aux aurores pour retourner à l’endroit des jeeps qui ne sont là que le matin. Les rues de Leh sont encore désertes, le soleil vient à peine de se lever. Je passe par le quartier musulman d’où l’appel du muezlin depuis les haut parleurs de la mosquée m’a réveillé les matins précédents. J’en profite pour acheter une espèce de nan (espèce de pain indien) au boulanger du coin qui vient de mettre en route son four. En fait ils sont trois: un qui fait la pâte et le nan, l’autre qui colle le nan dans le four, sur les côtés, et le troisième qui prend le nan dans le four une fois qu’il est cuit, avec une longue pique. 
Bref je marche tranquillement dans la rue principale encore vide à cette heure-ci, quand un chien qui semblait dormir sur le trottoir se lève et se rue sur moi en aboyant et en grognant. Je suis obligée de reculer car je n’ ai pas envie de me faire mordre par ce clébard tout baveux. Je repasse mais cette fois-ci je suis sur le trottoir d’en face, assez loin du chien. Et beh non, celui-ci n’est toujours pas content, je dois être encore sur son territoire où je ne sais pas quoi et il se rue vers moi, encore plus menaçant. Je suis obligée de m’enfuir en courant, je lui jette même mon nan en me disant qu’il préférera peut-être le manger plutôt qu’un morceau de ma jambe, mais non que dalle apparemment il a l’air de préférer la chair de nain de jardin puisqu’il me poursuit tous crocs dehors, prêt à me sauter à la gorge. Je m’enfuis en hurlant en courant le plus vite possible, mais avec mes vingt kilos sur le dos j’avance comme une tortue… Je ne dois mon salut qu’à un intouchable (la plus basse caste en inde) qui passait par là avec sa poubelle roulante, qui s’est mis entre le chien et moi et qui lui a donné un énorme coup de bâton sur la truffe, comme un joueur de baseball qui frappe dans la balle. Le chien s’en va tout penaud en couinant de douleur. Bien fait pour ta truffe! L’ intouchable me fait comprendre de rester avec lui pour finir la rue, au cas où il reviendrai ou si un des chiens de la meute (ils étaient une bonne dizaine) décidait de prendre son petit dej avec un morceau de ma jambe. A la fin de la rue je le remercie chaleureusement et je me dirige vers les jeeps, avec ma bombe à poivre dans la main (si ça marche pour les humains ça marche aussi pour les chiens non?) et en regardant derrière moi toutes les dix secondes pour voir si le molosse n’est pas de retour. Enfin bref tout ça pour dire que Leh et toutes les villes indiennes d’une manière générale sont remplies de chiens errants qui sont carrément devenus sauvages et supers agressifs. Pensez-y si vous partez tôt le matin pour prendre un bus, moi j’ai bien failli me faire bouffer! 
J’arrive à l’endroit et ô miracle il y a des jeeps qui attendent. C’est 400 roupies par personne, je demande discretos à une nana indienne dans la jeep combien elle paie, histoire de ne pas me faire avoir, elle me dit 400 roupies aussi. Ça aussi des fois c’est fatiguant, toujours essayer de savoir si on se fait rouler ou pas. Mais bon après avoir passé deux mois en inde himalayenne je peux vous dire que les gens sont beaucoup plus honnêtes que dans le reste du pays, même si je n’ai jamais rencontré de gros escrocs, peut-être parce que je me méfie à mort de tout le monde. Bref dans le nord les gens sont mégas honnête, du genre à vous courir après pour vous rendre la monnaie si vous l’avez oublié. C’est peut-être la religion qui veut ça, les gens là-haut sont bouddhistes. Peut-être que ça n’a rien à voir, je ne sais pas. Une fois que je suis installée dans la jeep je vois un bus quelques rues plus haut, je demande s’il va au même endroit on me dit oui, alors je prends mes affaires qui sont sur le toit, je cours comme une dératée, mais le bus démarre et s’en va. Zut! J’aurai pu payer beaucoup moins cher, et puis je préfère toujours prendre le bus public. Bon tant pis, je reviens à la jeep et c’est parti. Ma seule consolation c’est que en jeep ça va prendre dans les 5h si je me rappelle bien, alors qu’en bus ça prend le double facilement. 
Avant d’arriver sur le col de Khardung (5602m, considéré comme le col carrossable le plus haut du monde, tu m’étonnes que j’ai mal à la tête!), il faut que je présente mon permis spécial qu’il faut avoir pour visiter cette zone, car la frontière avec la chine n’est pas très loin. La vue depuis la route est superbe. Les montagnes ocres du ladakh s’étirent à perte de vue, et juste au milieu il y a cette oasis verte, véritable patchwork de champs et cultures. La route pour aller au col n’est pas goudronnée, c’est une piste faite de nids de poule qui me rappelle le trajet manali leh où j’ai bien failli dégobiller mes tripes à maintes reprises. Heureusement on arrive de l’autre côté. Et là waooo  j’ai le souffle coupé par le paysage. 
D’immenses canyons coupent le sol aride, les majestueuses montagnes brun rouge ont des versants où des cheminées de fées poussent comme des champignons, le vert des champs tranche avec le marron, rouge, ocre des montagnes… Et puis il y a une rivière bleu turquoise, la Nubra, dont les nombreux bras serpentent au milieu de la plaine constituée d’une immense étendue de sable gris pâle étincelant. Nous allons passer par Khardung, un petit village d’éleveur de yaks composé de quelques maisons ladakhies entourées de champs d’orge et de quelques chortens.   
Nous faisons une pause pour les fumeurs et pour les pisseurs chroniques comme moi. Il y a plein d’ânes qui paissent tranquillement dans le champs, j’adore ces animaux. Il y a surtout un bébé âne tellement craquant que j’ai envie de le mettre dans le coffre de la jeep. En plus il n’a même pas peur il se laisse caresser. J’aurai bien passé ma journée avec lui! Nous reprenons la route et plus tard nous arrivons au terminus, Diskit. C’est le plus gros village de la région, il n’est guère attrayant mais ma fois il y a des hôtels et surtout internet qui marche (des fois)! Je me trouve un hôtel sympa perdu dans un jardin, je négocie la chambre (ça aussi c’est chiant, toujours négocier en inde si on veut pas se faire avoir), je pose mes affaires et je vais manger un plat de chowmein (des espèces de pâtes en sauce avec des légumes et autre) dans une cantine du coin. Les chowmeins ont un goût bizarre, je trouve ça louche mais bon comme je suis un ventre sur pâte je mange quand même bien sûr (je ne le sais pas encore mais je vais être malade comme un chien pendant les trois prochains jours, non mais je m’en foutrai des claques des fois). 
Une fois rassasiée (même si c’était pas bon du tout), je prends la direction du monastère. En effet Diskit est surtout connu pour abriter un des plus beaux monastères du Laddak, le diskit gompa (monastère). Datant du 17eme siècle, ce dernier est un ensemble de petites maisons construites à flanc de montagne, tout au bord d’un précipice vertigineux. C’est à se demander comment les bâtiments font pour tenir sur ce pic autant escarpé! Pour y aller ça grimpe dur, et je ne sais pas pourquoi mais je commence à me sentir pas très bien. Mon bide qui fait un bruit bizarre, plus d’énergie du tout, comme une mémé qui essaie de courir un marathon… Je suis obligée de m’arrêter à intervalles réguliers, à essayer de trouver de l’ombre sous les rochers, dans ce cagnard écrasant… Pour aller au monastère je passe devant d’interminables murs de prière et de nombreux chortens. J’arrive en bas du monastère, un moine attend les visiteurs à l’ombre d’une petite cabane pour leur faire payer le droit ‘ entrée. Il me regarde un peu bizarrement, il faut dire que je suis au bord du malaise, il me dit de me reposer à l’ombre. Je dis ok, trop contente de trouver un peu de frais où me poser. Bon je suis vite repartie, car l’odeur corporelle du bonze commençait légèrement à me chatouiller le nez. Je pense que la dernière fois qu’il a du se laver ça devait être lors de la venue du Dalai Lama dans le monastère, en juillet 2000… Bref j’arrive au monastère, c’est très jolie, la vue sur la vallée de la nubra est magnifique. Après avoir l’avoir visité, pris environ 500 photos, je me remets en route pour le village, où m’attend mon lit que je ne vais pas quitter pendant trois jours. J’arrive à l’hôtel, je fais un plongeon mémorable dans la couette après avoir pris une douche (froide cela va sans dire).  
Enfin bref je vous passe les détails scabreux mais j’ai été malade comme un chien, j’ai vomi mes tripes toute la nuit. Je me revois agonisante sur le sol de la salle de bain, à me traîner jusqu’aux chiottes pour vomir les chowmeins qui étaient en train littéralement de me ronger les tripes. J’ai pensé à jouer la vengeuse masquée pendant la nuit et  aller mettre le feu à la cantine mais je n’avais déjà presque plus de force pour ramper jusqu’à mon lit donc bon… ils ont eu de la chance lol. Et oui les joies de l’ inde! J’adore ce pays mais j’ai l’impression que celui-ci ne m’aime pas du tout, c’est mon deuxième séjour et les deux fois j’ai été malade comme un chien ( à ce moment là je ne sais pas encore que je vais être cent fois plus malade deux mois plus tard, ce qui me vaudra même un bref passage à l’hôpital…). 
Le lendemain je reste dans mon lit, emmitouflée dans les couvertures. Le sur lendemain je me dis beh tiens je suis mieux, je vais tenter une sortie. Je vais à Hunder, à dix km de Diskit, car là-bas il y a un autre gompa et surtout des dunes de sable très photogéniques paraît-il, où on peut faire du chameau. Je n’ai pas l’intention de faire du chameau, j’en ai fait dans le Rajasthan, c’était sympa une heure mais après franchement jetais courbaturée de partout. Je veux juste prendre quelques photos. Bref la sortie s’est révélée désastreuse, après avoir marché dix minutes dans le village j’ai à nouveau la tension proche de 4 ou 5, je suis à l’agonie. 
Je décide de rentrer, je fais du stop, une première voiture remplie d’ indiens mecs s’arrêtent, non merci les gars j’ai pas envie de finir dans la rubrique fait divers. Puis une autre voiture s’arrête avec un couple et un bébé, très gentils, ils me laissent un peu plus loin et pour renter à Diskit je trouve deux allemandes avec leur chauffeur indien qui me déposent devant mon hôtel. Clap de fin de la journée, il est 10h et je disparais sous mes couvertures, en ayant fait quand même un petit aller retour vomito dans la salle de bain. 
Le lendemain je me trouve mieux, je prends le bus qui va à Panamik. Je fais bien de monter dans le bus tôt car lorsque l’on part il est bondé, c’est le seul bus de la journée qui remonte toute la vallée. Il y a plein d’écoliers en uniforme, des femmes avec leur marchandise qui vont au marché, des vieillards qui récitent leur prières à haute voix tout en tournant leur mini moulin à prière portatif… 
Je vais à Panamik car apparemment il y a des sources d’eau chaude sympa là-bas. Le paysage qui défile sous mes yeux est magnifique, une fois de plus. Le bus me largue devant une des rares guest house du mini village, tenue par une mère et sa fille. Une fois installée je vais aux sources, qui sont en fait tout riquiqui, y a pas grand chose à voir. C’est pas grave je mange mes momos chéris (tout en passant à toi cam comme d’ ab) devant ce superbe panorama. L’après midi je décide de partir marcher un peu, sur le lonely planet il est écrit qu’à un endroit, 4km plus loin, la vue depuis un pont est magnifique. Les 4km sont interminables, j’ai l’ impression que c’est dix fois plus. Un peu avant le pont je présente mon laisser passer au poste de police. Puis j’arrive au pont, l’endroit est désert. La vue est effectivement très belle. 
Je prends quelques photos et là un 4/4 de l’armée passe devant moi, il y a quatre ou cinq militaires à l’intérieur. Le 4/4  s’arrête à quelques mètres de moi, juste avant le pont. Je vois les militaires qui me regardent bizarrement et qui commencent à discuter entre eux. Je trouve ça un peu louche, alors je m’éloigne. Quand je vois la voiture redémarrer et traverser le pont je me dit que je suis complètement parano. Mais une fois que le 4/4 a traversé le pont, il s’arrête. Les militaires semblent discuter, et là j’ai une énorme montée d’adrénaline quand je vois le 4/4 commencer à faire une marche arrière. Je précise que l’endroit est complètement désert, il n’y a que eux et moi. Je m’éloigne d’un pas plus rapide, limite à courir. Puis la voiture continue à avancer, très lentement. S’arrête à nouveau. Et là je frôle le malaise quand je vois à nouveau qu’ elle commence à faire une marche arrière. S’en est trop pour moi, cette fois ci je cours le plus vite possible, j’ai peut-être 500 mètres à faire avant de trouver des habitations. Je ne me retourne même pas, je cours à perdre haleine. Après une course interminable j’arrive aux premières maisons essoufflée comme jamais. Les quelques habitants me regardent bizarrement. Je regarde derrière moi, le 4/4 n’est pas là, il a continué sa route finalement. 
Je ne sais pas si je me suis montée la tête toute seule. Peut-être que oui, mais tout ce que je sais c’est qu’un 4/4 rempli de mecs qui s’arrête devant moi, qui continue, qui revient sur ses pas, deux fois, en inde, dans un endroit complètement paumé avec degun, c’est assez bizarre pour qu’ il y ai une grosse lumière rouge qui clignote dans ma tête avec la sirène et que mon instinct qui pour l’instant ne m’a jamais trompé durant ce voyage (à part pour manger des trucs qui me rendent malade) me disent de me barrer vite fait de cet endroit. Une semaine plus tôt avant que j’ arrive à manali une touriste a été violée par des mecs, je n’ai pas voulu attendre de savoir si ces militaires étaient bien intentionnés ou pas pour me mettre à courir. D’autant plus que je ne fais absolument pas confiance aux militaires et aux policiers, qui sont bien connus en inde pour être des ripoux chevronnes (pas tous j’imagine mais quand même). Bref est ce que j’ai eu raison de m’en faire ou pas je ne sais pas et je ne le saurai jamais mais mieux vaut prévenir que guérir! Après cette mésaventure réelle ou imaginaire je reprends le chemin de l’hôtel. 
Le soir je mange avec un groupe de mecs de Mumbai qui sont en vacances. Ils ont l’air d’avoir de l’argent, apparemment ils sont dans le nord quelques temps pour échapper à la mousson qui fait rage dans le sud, comme beaucoup d’indiens riches. Ce qui ne les empêchent pas de partir à l’aube sans payer les deux chambres et leur repas. Ça me dégoûte, la femme de l’hôtel en a pleuré, c’est un énorme manque à gagner pour elle et sa modeste famille. Je rêve de croiser ces fils de p… à Leh, et de leur foutre la honte devant tout le monde. Mais bon ça ne sera pas le cas malheureusement. Je reprends le bus le lendemain, puis une jeep directement lorsque j’arrive à Diskit pour Leh où j’arrive en début d’ après-midi. Voilou la Nubra Valley c’était bien sympa, si on met de côté mes trois jours de dégobillage de tripes et ma grosse peur (vrai ou exagérée de ma part?) avec ces militaires louches!
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Les chortens devant le monastere.
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Mur de priere, chorten et monastere.
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Le monastere de Diskit.
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Mur de priere, chorten et Nubra Valley.
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Le monastere suspendu au bord du precipice.
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Un moine qui contemple la vallee.
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La vue depuis les hot springs.
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Mes momos.
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La vue depuis le pont.
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La riviere de la nubra dans la vallee.

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