La porte de l’enfer de Darvaza.

Tout d’abord je fais une petite annonce car je pense pas que vous me lirez jusqu’au bout (pas grave je comprends je sais que je raconte trop ma vie lol). Je suis à la recherche des lonely planet Mongolie et Chine, en format pdf, même des anciennes éditions. Donc si une âme charitable a ça sur son ordi, je suis preneuse, merci d’avance (ça coûte un bras ces trucs)!
Après avoir récupéré de justesse mon visa de transit pour le Turkménistan, je me dirige dès le lendemain matin vers la frontière irano-turkmène, après avoir dit au revoir à Mohi et Sherry, deux iraniens au top du top.

Après avoir pris deux bus et un taxi partagé me voila au poste de frontière de Bajgiran. L’endroit est perdu dans les montagnes recouvertes de neige.
Après être sortie de l’Iran je me débarrasse enfin du foulard que j’avais sur la tête depuis un mois. Quel bonheur! Je jurerai avoir entendu mes cheveux respirer pour la première fois depuis des semaines. Quelle plaie ce truc! C’est sur qu’on s’habitue après quelques temps, qu’on fini par plus ou moins s’y habituer.
Mais tous les soirs je devais démêler l’arriéré de ma tête qui se transformait tous les jours en un nœud géant à cause du frottement du foulard sur les cheveux. J’ai perdu je sais pas combien de touffes de ma chevelure à cause de ce truc! Sans compter bien sur l’aspect avilissant du voile, qui place les femmes à un niveau inférieur que celui des hommes sous un prétexte religieux que je ne supporte pas, mais bon je n’étais pas en Iran pour refaire les droits de la femme malheureusement.
Bref je me débarrasse de ce truc et le remet à sa place normale, à savoir autour du cou!
Je rentre dans le poste frontière Turkmène, où je vais rester une bonne heure. Ils vont fouiller mon sac comme si j’étais un nain de jardin terroriste, vous comprenez on ne sait jamais! Ils sortent tout, mettent leurs mains dégueulasses dans mes habits… Ils me disent « gun, gun, gun »? Je ne me risque pas à faire une mauvaise blague de peur de passer mes prochaines semaines dans une geôle turkmène et je dis no no, no guns.
Non mais franchement j’ai la tête à me balader avec une kalachnikov dans mon sac à dos?
Il y a même un petit comique qui feint d’avoir trouve une balle de kalash en la personne d’un tampon, après avoir trifouillé encore une fois avec ses gros doigts immondes dans ma trousse de toilette. T’es un comique toi dis moi, ils sont tous comme toi au Turkménistan? Ça va être cool je sens tiens!!
Bref après avoir fouillé chaque mm2 de mon gros sac à dos ils me disent ok ok. Oué beh les gars il va falloir être meilleur que ça la prochaine fois car j’ai ma bombe à poivre dans la petite poche extérieure de mon petit sac à dos et vous l’avez même pas trouvé hehehe!
Je prends congé de mes supers policiers pas du tout lourds et je fait mes premiers pas au Turkmekistan. Encore un pays où je n’aurai jamais cru aller, et que franchement je ne savais même pas placer sur la carte avant de m’intéresser à la question!

Quelques mots d’histoire: avant 1991 le Turkménistan faisait partie de l’URSS. Après l’effondrement de ce dernier le pays proclame son indépendance, comme les autres pays de la région.
De 1991 à 2006 le Turkménistan a été gouverné par un premier dictateur, Saparmourad Niazov, qui avait été élu en 1985 secrétaire général du parti communiste du Turkménistan. A l’effondrement de l’empire soviétique il en a profité pour rester au pouvoir.
Commence alors une longue descente aux enfers pour la population turkmène et l’ascension d’un mégalomane qui se prenait pour dieu tout puissant, comme la plupart des dictateurs.
Il interdit tout autre parti politique et commença à développer son culte de sa personnalité. Il ordonna que tout le monde l’appelle Turkmenbachi (chef des Turkmènes), fit ériger des statues à son effigie à tous les coins de rues et placarder son portrait sur tous les bâtiments. On retrouvait son visage de partout, des billets de banque jusqu’aux bouteilles de vodka. Il a même donné son nom à une météorite.
A Ashgabat, la capitale, il avait même fait construire une statue (en or bien sur) de lui même d’une douzaine de mètres de haut, elle même perchée sur une arche de 75m (!!), l’arche de la neutralité, qui tournait sur elle même de manière à ce que son visage soit toujours tourné vers le soleil… Pas un peu mégalo le tyran!
Ce gentil monsieur a même eu le culot de dire: « Personnellement, je suis opposé à ce que l’on voie des images ou des statues de moi dans les rues… mais c’est ce que veut le peuple. »
Son successeur/dictateur a fait enlevé la statue en 2010. En plus de faire construire des statues le représentant il en a aussi construites représentant sa mère, qu’il adorait. Son slogan « Halk, Watan, aturmenbasi » ( Le peuple, la nation, le Turkmenbachi) ressemblait étrangement  au  » ein volk, ein reich, ein fuhrer » d’Hitler (un peuple, un empire, un chef)… Ça donnait le ton pour les années noires qui s’annonçaient! Il fut considéré comme l’un des dictateurs les plus autoritaires du monde. Il cumulait les postes de chef de l’État, chef du gouvernement, de commandant suprême de l’armée, et président du parti « démocratique » du Turkménistan, encore une fois le seul autorisé.
Le 20 décembre 1999, il est proclamé président à vie par le corps législatif fantoche du pays, le Majilis, décision confirmée en 2002 par le conseil du peuple, qui est censé se réunir une fois par an mais qui ne l’avait plus fait depuis 3 ans.
Autre exemple de sa mégalomanie: en 2002 il a rendu obsolète le mot traditionnel turkmène corek, qui désigne le pain, pour le remplacer par gurbansoltan eje (prénom de sa mère).
En 2006, une nouvelle variété de melon est baptisée turmenbasy. En août 2004 il a ordonné qu’un immense palais de glace soit construit en plein milieu du désert turkmène. Après 15 ans d’oppression et de mégalomanie sans limites le dictateur succombe d’une crise cardiaque, en 2006. Le vice premier ministre j’ai nommé Gourbangouly Berdymoukhamedov pris la tête du pays avec le soutient des partisans de feu Niazov, après avoir été élu à 90 pourcent des voix à l’élection de février 2007. Il faut dire que seul le parti politique unique a présenté des candidats et que ces derniers ont tellement subit des pressions que même en étant candidat à l’élection ils soutenaient ouvertement le Berdymoukhamedoz! Selon la rumeur ce dernier serait un fils illégitime de Niazov. Bien que ce dernier n’avait que 17 ans lors de la naissance de Berdy, la ressemblance des deux hommes est tellement frappante que les rumeurs sur cette filiation n’ont cessé d’alimenter les conversations au Turkménistan.
Lors de sa prise de pouvoir le successeur de Niazov fit quelques efforts pour atténuer le culte de la personnalité et les délires du précédant dictateur. Il supprima les initiatives les plus délirantes, comme donner aux mois et aux jours les noms des membres de la famille du Turkembachi (janvier était devenu turkmenbasy, avril gurbansoltan eje, le nom de sa mère…), l’interdiction des ballets ou celle d’écouter de la musique en voiture…
Mais les signes encourageants se sont arrêtés là, et même s’il est un peu moins mégalo que son prédécesseur on peut quand même voir de nombreux portraits de Berdymoukhamedoz dans toutes les villes et villages turkmènes. Il a fait construire par le groupe francais BTP Bouygues, un des principaux bâtisseurs dans le pays, le gigantesque palais présidentiel de 70000m2 comprenant notamment un palais de marbre blanc coiffé de cinq coupoles recouvertes de feuilles d’or; en 2011 il a inauguré un Palais du Bonheur, de 60 000 m2, pour accueillir les cérémonies et mariages d’Achgabat, pour la modique somme de 100 millions d’euros.
Il a été réélu en février 2011 avec 97 pourcent des voix… A l’occasion de des 50 ans il s’est lui même auto décoré de l’ordre de la Mère Patrie, la plus haute distinction du pays, un collier d’or et de diamants pesant près d’un kg.
De nos jours le Turkménistan est un pays où la liberté d’expression n’est qu’une légende et où de très nombreux opposants au dictateurs croupissent dans des geôles sordides où ils sont torturés.
De plus le pays possède d’immenses réserves de pétroles et de gaz, qui engendrent des milliards de bénéfice chaque année, mais ces bénéfices sont engloutis dans les projets mégalomanes du dictateur et ne profitent absolument pas à la population qui vit dans une situation de plus en plus précaire, derrière la vitrine de richesse et de grandeur imposée par le dictateur.

Après le poste frontière il y a un no mens land de 25km qu’il faut obligatoirement traverser avec des minis bus qui sont les seuls véhicules autorisés à transporter des civils dans cette zone.
Le racket anti touriste commence dès lors. Je dois me délester de 10 dollars pour faire ces malheureux 25 km, alors que les locaux eux doivent même pas payer 1 dollars. P…. qu’est ce que ça m’énerve quand c’est comme ça! J’ai envie de faire bouffer le billet au chauffeur qui vient me réclamer son du avec son sourire édenté qui dit et oui je suis bien entrain de te b….. et t’a pas le choix!
Ensuite Normalement il faut encore dépenser 20 dollars (!!!) pour aller jusque dans la capitale qui n’est qu’à quelques km de là, mais heureusement je trouve des locaux avec qui partager les frais et j’en suis quitte pour 5 dollars. Dans le taxi les deux locaux qui sont avec moi me regardent, discutent entre eux et se marrent. Ils se foutent clairement de ma gueule pour je ne sais quelle raison. Aie aie aie je sens que je ne vais pas trop aimer le Turkménistan, c’est peut être pas plus mal que je n’ai obtenu qu’ un visa de transit de 5 jours!
Le taxi arrive dans la ville, et là j’ai du mal à croire ce que je vois: à perte de vue il y a des dizaines et des dizaines de palais et d’immeubles qui se construisent. Le hic c’est que l’architecture de ces bâtiments n’a rien à voir avec ce à quoi l’on pourrai s’attendre.
En effet l’ensemble ressemble plus à Las Vegas où aux immeubles art déco de Miami qu’autre chose! Certains ont des formes vraiment bizarres, avec des pointes qui visent le ciel comme s’il s’agissaient de fusées prêtes à décoller…
Les avenues sont interminables, et elles sont bordées de part et d’autre de ces immeubles, construits entièrement en marbre, qui poussent comme des champignons tous les 20 mètres. Ce qui surprend aussi c’est le fait que les rues où sont construits ces immeubles sont complètement vides. De temps en temps il y a quelques personnes qui marchent ça et là, mais sinon on a vraiment l’impression qu’il s’agit d’un studio de cinéma avec des décors plus vrais que nature!
En fait j’apprendrai plus tard que ces bâtiments sont, pour la plupart, vides. En effet personne ne pourrai se permettre d’y habiter, c’est bien trop chers! En fait il y a quelques années de cela le dictateur a décidé de faire d’Achgabat une des plus belles villes du monde. Il a donc entrepris de construire cette fastueuse vitrine qui a engloutit des milliards de petro dollars.
En effet depuis le premier dictateur la volonté a été de remplacer l’architecture soviétique qui était devenue personæ non gratae après l’indépendance par une architecture turkmène. Le problème c’est que avant,  les turkmènes étaient des  tribus nomades et que donc il n’y avait pas vraiment d’architecture turkmène pre-soviétique ou pre-tsariste a proprement parler.
Donc ce sont les deux dictateurs qui ont inventés un style censé reprendre un style turkmène qui n’ a pourtant jamais existé. Et c’est ainsi qu’on a l’impression d’arriver dans un décors de film de science fiction façonné selon la mégalomanie et la folie des grandeurs de ces deux tyrans.
La grande majorité des habitants d’Achgabat vivent dans des quartiers en périphérie de la ville vitrine, quartiers qui sont issus de l’ère soviétique et qui sont bien souvent en partie délabrés et où les habitants vivent dans des conditions de plus en plus précaires.
Je demande au taxi de m’arrêter devant un immense hôtel en plein centre de la ville. Le Turkménistan est un pays atrocement chers. Il n’y a rien à moins de 20-30 dollars la nuit… Une fortune pour moi!
Fort heureusement, j’ai réussi à trouver un couchsurfer pour m’héberger lors de mon séjour à Achgabat. Il s’appelle Kerim, il vit avec sa famille dans un appartement de la ville. Il m’ a donné son adresse, et d’après mes recherches la veille sur google map il n’habite pas très loin.
Après avoir bien galéré avec mes 15kg sur le dos dans les rues de la ville (sur google map ça a l’air très simple mais en vrai c’est toujours plus compliqué), j’arrive toute contente à l’adresse qu’il m’ a indiquée sur couchsurfing. La bonne rue, le bon numéro d’immeuble, le bon numéro d’appart… Je suis vraiment toute contente de m’être bien dépatouillée car dans cette ville c’était pas du gâteau!
Le seul hic c’est qu’il n’y a personne dans l’appart. Bon je me dis c’est normal ils sont surement au boulot. Et puis c’est la bonne adresse, la voisine m’a dit que c’était la bonne famille (en fait cette connasse super désagréable n’a rien compris ou n’a pas voulu comprendre). Donc j’attends comme une clocharde dans l’escalier, avec le bide qui commence à crier famine car je n’ai rien mangé depuis la veille. Tais toi, on mangera quand on sera avec Kerim, là j’ai trop la flemme de chercher!
J’attends avec un chien plein de puce qui semble m’avoir adopté mais au départ il voulait plutôt me bouffer! Je lui ai donné un biscuit qui traîne dans mon sac et comme par hasard on est devenu potes. Au bout de deux heures je commence à m’endormir quand la fille de la voisine a pitié de moi et m’apporte des petits gâteaux. Ha tient y a des Turkmènes sympa, ça fait plaisir à voir! Elle me dit aussi que je peux utiliser son téléphone si je veux. Merci mais je vais attendre encore un peu.
Plus tard une nana arrive sur le pallier et ouvre la porte de l’appart. Je me dis chouette! Ça doit être la sœur de Kerim, je suis plus à la rue! Je vais vers elle, je lui demande si c’est bien chez Kerim, et là elle me dit haaaa non pas du tout, vous faites erreur.
Quoiiii mais pourtant je suis bien à la bonne adresse c’est quoi cette histoire?! Du coup je tape à la porte de la voisine, la nana super sympa me prête son portable. Et là au bout du fil… Y a un mec qui parle pas du tout anglais, qui doit avoir dans les 90 ans… Bref en plus de m’avoir donné une fausse adresse, il m’a donné un faux numéro! Arghhhh mais c’est quoi ce plan foireux?!
Lasse je reprends mes affaires et me retrouve dans la rue avec le chien qui me suit comme son ombre, surement persuadé que j’ai d’autres biscuits dans ma poche. Et puis finalement il s’en va. Super, maintenant je suis littéralement sans amis à Achgabat, Turkménistan.
Je commence à prendre le chemin du centre ville à la recherche d’un hôtel qui allait surement me coûter un bras et demi, voir deux. Je commence à faire des calculs dans ma tête, alors si je dors dans la gare de train ou de bus et que je mange des biscuit pendant 5 jours peut être que je vais pas trop dépenser d’argent??
Sauf que ces rats d’égouts de turkmènes ferment les gares la nuit. Et oui, on est pas en inde, t’a cru que quoi!?
J’arrive juste pas à croire que le mec m’a donné de fausses informations. Vraiment pas sympa les turkmènes! En chemin je m’arrête dans une supérette pour m’acheter des biscuits. A la caisse je demande au mec si je peux téléphoner de son portable, je me dis tant avec un petit miracle Kerim va me répondre, tant il prenait sa douche et c’est son grand-père qui a répondu?
Quand je donne le numéro au mec il me dit beh non c’est pas un numéro turkmène ça! Il enlève les trois premiers chiffres, il les remplace par un 8 et me donne le téléphone. Et là, devinez qui c’est qui répond!?! C’est Kerim! Il me dit pas de problème, je viens te chercher ne bouge pas de là où tu es. Je lui redonne le mec de la supérette qui lui explique où je suis. Et cinq minutes plus tard il débarque. Ouuuufff je suis sauvée!
Dans la voiture il m’explique pourquoi il m’a donné une fausse adresse. En fait au Turkménistan le couchsurfing est interdit. Si un local accueille un étranger chez lui il faut qu’il aille le déclarer à la police.
Donc vous imaginez bien que personne ne veut aller à la police pour faire cette déclaration, ça serai une source d’ennuis intarissable. Un jour un étranger qui devait aller chez kerim a eu le malheur de le dire à la police, lors d’un contrôle. Résultat Kerim a du aller pointer tous les jours au commissariat pendant un mois. Donc du coup maintenant il ne donne plus sa véritable adresse.
Bon ok je comprends mais pour le numéro de téléphone? Si j’ai ni ton adresse ni ton numéro je fais comment? Je devine? Bon je laisse tomber de toute façon c’est pas grave, je suis bien trop contente de l’avoir trouvé.
Une fois à l’appartement je fais connaissance avec le reste de la famille.
Il y a les parents, qui sont médecins en entreprise et dans un centre de dialyse. Il y a la grande sœur, Maya, qui est mariée avec un indien, ils vivent à Dubaï car il est impossible pour son maris d’obtenir un visa pour le Turkménistan, et il viennent juste d’avoir un bébé, qui a quelques semaines. Et Kerim bien sur, il a 25 ans et il est comptable.
Cette famille a été adorable avec moi, ils m’ont super bien accueilli.
Je dois dire que j’ai trouvé la vie de Kerim et de sa famille assez triste et morne. En fait au Turkménistan les gens travaillent 6 jours sur 7, le dimanche est leur seul jour de repos hebdomadaire.
Les journées sont supers longues, de 8h du mat à 18-19h, avec une toute petite pause entre midi et deux pour manger un sandwich et pour faire la prière du milieu de la journée. Et ils sont vraiment à la merci de leur patron. Par exemple kerim a du aller bosser quelques heures dimanche matin…
En ce qui concerne les vacances, il avait 7 jours par an il me semble.
Sinon il a rencontré une nana au boulot, ils veulent se marier normalement pour la fin de l’année mais c’est même pas sur, car il faut que Kerim verse 10000 dollars à la famille de sa dulcinée. Apparemment c’est comme ça au Turkménistan, il faut acheter sa femme. En encore, kerim me dit que 10000  dollars c’est pas trop cher, certaines familles demandent beaucoup plus!
Kerim essaie d’économiser un max pour pouvoir débourser cette somme. Et encore, ça c’est juste pour acheter sa femme! Car il faut aussi qu’il paie pour le mariage. Et en général lors des mariages turkmènes il y a plusieurs centaines d’invités… Kerim n’en invitera « qu’une » centaine… Bref c’est un peu chaud patate pour un mec qui gagne 700 dollars par mois et qui travaille comme un mulet 6,5 jours par semaine!
Ses parents aussi travaillent énormément, ils enchaînent des nuits à l’hôpital avec des journées en entreprise.
Le soir quand ils arrivent ils sont crevés par leur journées et regardent des programmes de télé russes que captent leur antenne.
Heureusement qu’il y a ces émissions russes car vous imaginez bien que les programmes télé turkmène ne sont pas des plus intéressants…
Sur chaque chaîne de télé on retrouve le visage du dictateur. Le dictateur qui inaugure un nouveau palais ou une nouvelle statue de lui même, le dictateur qui visite une usine, le dictateur qui fait du cheval… A ce propos il y a quelques semaines de cela ce dernier a lourdement chuté lors d’une course dans un hippodrome, devant des spectateurs qui ont filmé la scène. Son entourage a essayé d’étouffer l’affaire, mais des vidéos ont réussies à filtrer et se sont retrouvées sur le net! Vous comprenez, c’est une honte intergalactique pour un homme qui contrôle à la perfection son image et chaque seconde de sa vie publique!
Malheureusement il n’a pas eu grand chose et il est apparu tout souriant à la télé quelques jours après sa mésaventure. On ne sait pas ce qu’il est advenu du cheval, j’espère qu’ils ne lui on pas tiré une balle entre les deux yeux pour laver l’affront subit par monsieur le « président ».
La vidéo sur ce lien (j’espère qu’il s’est bien fait mal ce rat d’égout): http://www.franceinfo.fr/monde/le-president-turkmene-chute-de-cheval-et-tente-d-etouffer-l-affaire-972833-2013-05-01
Autre chose qui m’a choqué lorsque j’ai regardé la télévision, ce sont les séances au parlement où je ne sais où. On voit le dictateur sur son perchoir qui écoute les députés (je ne sais pas exactement) parler.
Ces derniers lorsqu’ils parlent regardent par terre, surtout pas le dictateur. Et pour cause, ils n’ont pas le droit de le regarder dans les yeux, Kerim me dit que c’est formellement interdit.
Du coup lorsque le député parle on voit les autres députés le regard plongé dans leur cahier où ils prennent tous des notes. Je vous jure il n’y en a pas un qui a le nez en l’air, ils écrivent avidement commesci leur vie en dépendait, le crayon ne quitte pas le papier une seule seconde. Ça fait froid dans le dos!
La nuit tombée Kerim m’installe un matelas très fin sur le tapis du bureau, avec une couverture. C’est comme ça qu’ils dorment la bas, avec un mini matelas sur le sol.

Le lendemain matin Kerim m’appelle de son bureau pour me dire qu’il a trouvé des co voitureurs pour aller dans le désert du Karakoum, pour voir le cratère de gaz de Darvaza. Ce cratère est un trou d’une cinquantaine de mètres de diamètre, qui est en combustion continue depuis 1971.
Le sous-sol de Darvaza est très riche en gaz naturel. En 1970 une équipe de géologues, forant le sol à la recherche d’un gisement, percé accidentellement une cavité souterraine qui provoque l’effondrement de la tour de forage, laissant dans le sol un trou béant qui a engloutit une partie de l’équipe. Personne n’ose aller les chercher à cause des émanations de gaz…
Pour éviter les risques d’explosion et de pollution atmosphérique, il est décidé de mettre le feu aux gaz qui émanent du trou. Les géologues estimaient que les réserves devaient s’épuiser en quelques semaines mais le puit brûle sans interruption depuis 1971!
L’endroit est surnommé « la porte de l’enfer ». Ça fait donc 43 ans que ça brûlé!
En 2010 le dictateur avait ordonné l’extinction du cratère qui mettait en périls les réserves de gaz des environs. Mais finalement c’est tombé à l’eau.
En 2004 Niazov a ordonné la destruction du village de Darvaza. La raison: monsieur trouvait le village moche. Les habitants ont été expulsés manu militari et le village a été raée…. Un autre exemple de la folie de ce mec!
Bref jamais je n’aurai cru un jour aller voir la porte de l’enfer. C’est assez éloigné, un peu galère pour y aller… Mais ce matin là Kerim me dit que trois de ses collègues y vont justement, et que si je veux je peux me joindre à eux, pour partager les frais d’essence. Super, ils passent me prendre quelques heures plus tard, on roule plusieurs heures au milieu du désert.
Puis à un moment donné le conducteur arrête la voiture et il me dit c’est bon c’est ici.-Heuuuu comment ça c’est ici ? Et il me dit -nous on s’arrête là, maintenant toi il faut que tu commence à marcher dans le désert.
-Mais comment ça?!? Vous venez pas avec moi?? -Behhh non nous on va tout au nord, dans une ville, nous on continue quoi! Haa ok super! Bon je vois qu’on s’est encore mal compris avec Kerim, franchement ça commence à être un peu lourd là.
Je leur dit aurevoir et je me retrouve au bord de la route, toute seule, avec la porte de l’enfer perdue au milieu du désert à deux heures de marche. Sympa! Hors de question que je me retrouve à marcher toute seule dans le désert, on dirai le Sahara et puis en plus le retour se fera de nuit. J’ai lu des témoignages de gens qui ont cherché ce truc pendant des heures, qui se sont perdus… Pas envie qu’on découvre mon corps momifié au détour d’une dune dans six mois!
Sur le bord de la route y a une espèce de restaurant très très simple, qui est tenue par une famille turkmène, antipathique au possible. Je demande si quelqu’un est dispo pour m’accompagner voir le cratère, y a le fils qui dit ok. Apparemment je peux aussi dormir parterre à mon retour, car vous imaginez bien que je ne vais pas faire du stop au milieu de nulle part en pleine nuit au Turkménistan.
Je pars avec le mec gentil comme une porte de prison. Je garde ma bombe à poivre dans ma poche, prête à la lui vider dans les yeux et lui faire bouffer le sable au moindre truc louche. Je le laisse marcher devant aussi, s’il veut me faire je ne sais pas quoi je le verrai au moins venir.
En fait je me suis très vite aperçue qu’il n’avait pas la moindre idée d’où était le cratère. J’ai fini par comprendre qu’il n’y était tout simplement jamais allé. Non mais quel boulet! A quoi ça sert que je te donne 10 dollars si tu sais même pas où on va!! Il a même le culot de me demander dans quelle direction on doit aller. Bon c’est juste parfait, je suis coincée dans le désert avec un boulet qui me sert à rien, et aucun indice pour trouver ce foutu cratère. On marche deux bonnes heures dans la direction que la nana de l’auberge m’a indiqué au début, on voit toujours rien, le soleil commence à se coucher, il commence à faire froid… Bref la loose complète quoi! En plus il n’y a pas un chat comme vous pouvez l’imaginer.
Finalement je monte en haut d’une dune de sable  et de là haut je scrute l’horizon, et à quelques km de là je vois une espèce de tache marron. Mais comme il fait encore jour on ne voit pas les flammes, et puis de loin on ne voit pas de trou. Mais en zoomant avec mon appareil photo je me dis quand même je vois pas ce que ça pourrai être d’autre. Finalement on y va, le boulet me suis de loin. Il sert vraiment à rien ce lui là! Je sais même pas s’il saura retrouver le chemin du retour, moi avec mon sens de l’orientation en bois je pense que je n’en suis pas capable!
On arrive près de la tache marron, on commence à sentir le gaz… Bingo, c’est bien le cratère!
Waooo c’est vraiment impressionnant!!
Devant moi il y a un immense trou béant, sorti de nulle part, d’où s’échappe une multitude de flammes, plus ou moins grandes. Il fait super chaud, et je me dis bon au moins si on retrouve pas le chemin du retour on peut toujours dormir ici, au moins on mourra pas de froid! Et si l’autre me saute dessus je le balance dans le cratère, on retrouvera même pas son squelette!
Voilou j’ai assisté à un superbe couche de soleil sur le désert avec le cratère au premier plan. Ce dernier est encore plus impressionnant la nuit, il ressort encore plus.
Une fois la nuit tombée nous reprenons le chemin du retour, cette fois ci ce fut beaucoup plus court car on ne s’est pas perdus. En effet il suffit juste de marcher tout droit avec la lueur du cratère dans le dos, pour arriver sur la route principale, 1,5 heures plus tard. C’est pas dur, mais il faut quand même bien regarder où l’on met les pieds. Il ne faut pas oublier sa lampe frontale. Je n’ai croisé aucun scorpion ou serpent, juste une tortue, je me demande bien comment elle fait pour vivre ici celle la!
Puis je m’endors sur un matelas posé dans le resto. Le lendemain je me barre vite, je n’aime pas ces gens. A mon réveil la nana me dit dollars,dollars,dollars… T’a peur de quoi? Que je m’enfuie en courant sans payer? J’ai la tête d’une voleuse? Y a vraiment des claques qui se perdent dès bon matin!
Franchement je ne peux pas trop parler car je n’ai été dans ce pays que cinq jours, mais à part Kerim et sa famille, la nana qui m’a donné les gâteaux et le mec de la supérette qui m’a prêté son portable j’ai croisé beaucoup de cons! Mais bon encore une fois en 5 jours je ne peux pas juger.
Mais disons qu’après avoir passé un mois en Iran avec des gens super gentils et accueillants, quand on arrive au Turkménistan ça fait un peu bizarre, on nous rappelle très vite notre statut de touriste/portefeuille sur patte!
Pour rentrer à Achgabat je fais du stop (pas gratuit of course hein dollars,dollars,dollars, mais bon ce n’est pas qu’au Turkménistan, en Asie centrale d’une manière générale le stop gratuit ça n’existe pas trop, hormis quelques rares exceptions).
Voilou le lendemain Kerim m’accompagne au bus, je lui dit aurevoir et un grand merci, car même s’il y a eu des malentendus il m’a quand même super bien accueilli, lui et sa famille. Vous ne verrez pas de photos de lui car il a peur qu’elles tombent entre les mains de la police et que cette dernière fasse une descente chez lui.
Je traverse le pays en une dizaine d’heures avec le seul bus qui va de Achgabat à Turkmenabat (départ de Achgabat à 8h du mat, ne le ratez pas il n’y en a qu’un seul). Je passe la frontière avec l’Ouzbékistan le lendemain matin.
Voilou le Turkménistan c’était sympa mais je n’ai vu qu’une toute petite partie du pays. En effet on ne peut pas visiter ce pays tout seul, il faut payer un guide, une agence, un véhicule privé. Seuls des visas de transit valables 5 jours sont délivrés aux voyageurs indépendants, pour aller de l’Iran jusqu’en Ouzbékistan, ou vice versa.
Prochain pays, l’Ouzbékistan!

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La porte de l’enfer.
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Pause avec mes co voitureurs.
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Train qui passe.
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La tortue.
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Le boulet dans le désert.
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J’ai pris ces photos le dernier jour en allant prendre le bus, depuis la voiture de Kerim, pour vous montrer la folle architecture d’Ashgabat.
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Une place déserte, il est interdit d’y marcher. Ça fait vraiment Corée du nord!
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Palais.
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Niavoz sur les billets turkmènes.
Image google.
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Les arrêts de bus de la ville vitrines sont super futuristes.
Achgabat

L’ancienne arche de la neutralité avec la statue de Niazov qui tourne en même temps que le soleil…
Image google.
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Les immeubles vides de la ville vitrine.
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